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Menaces sur le marché

Au moment où la livre égyptienne perd 3 % de sa valeur face à cette devise, un marché noir du billet vert commence à surgir. Les responsables de la Banque Centrale affirment toutefois que la situation est « sous contrôle ».

Après plus de 7 ans de disparition, le marché noir du billet vert refait lentement surface. Les clients des banques et des bureaux de change se voient proposer des dollars à un taux de 4 piastres inférieur au taux officiel. Ceci au moment où la monnaie nationale a perdu plus de 3 % de sa valeur face au dollar au cours des 3 derniers mois. « Un employé dans un bureau de change m’a proposé des dollars à 5,95 L.E. en m’assurant que son taux de change dépassera les 6 L.E. la semaine prochaine », raconte à Al-Ahram Hebdo Mohamad Soliman, un importateur d’appareils électroménagers, qui a été surpris par cette proposition. Mohamad n’est pas le seul. Ahmad Fahmy, un importateur, s’est vu offrir la même proposition à l’entrée d’une grande banque commerciale. « Mais j’ai refusé car je trouve des dollars sans problème à la banque », souligne-t-il. Les agents du marché noir sont visiblement en train de tester le marché. Le retour de ce marché est le résultat de la fermeture des banques pendant une semaine après la révolution du 25 janvier. Le dollar s’est échangé à 7,10 L.E. durant cette semaine au moment où son cours officiel était de 5,93 L.E. « J’ai reçu des centaines de demandes d’achat de dollars. Mais je n’ai pas été en mesure de fournir toutes ces quantités », souligne Ahmad, qui a profité du marché noir en vendant 100 000 dollars en une semaine. Il ajoute que le moment est propice à un retour de ce marché après la chute des recettes étatiques en dollars après la révolution. En effet, toutes les estimations prévoient le recul des recettes en dollars provenant du secteur du tourisme, des exportations ainsi que les Investissements Étrangers Directs (IED). « La baisse prévue de l’offre du billet vert va réduire la capacité des banques à répondre aux besoins de leurs clients. A ce moment-là, le marché noir va s’activer », souligne Ahmad. Cette baisse prévue de l’offre coïncide avec une montée de la demande sur le dollar. « Malgré la hausse de la Bourse, les étrangers ont vendu les bons du Trésor et les obligations qu’ils détenaient pour compenser les pertes qu’ils ont subies durant la fermeture de la Bourse. Et par la suite, ils ont accentué la demande sur le dollar pour transférer leurs capitaux dans leurs pays », explique Raouf Al-Kédwani de la Banque de développement des exportations.
Selon le dernier rapport de la maison de courtage Beltone, le taux de dollarisation est passé de 16,2 % en décembre 2010 à 16,6 % en janvier. « Cette hausse reste dans des limites acceptables. C’est en-dessous de nos estimations », explique à Al-Ahram Hebdo Mohamad Rahmy, du département des recherches au sein du groupe. Pour limiter les transferts de devises à l’étranger, les banques ont limité le montant des sommes transférables pour les particuliers à 10 000 dollars. Pour les importateurs et le secteur commercial, il n’y a pas de plafond. Cependant, les mesures nécessaires pour assurer le transfert sont plus difficiles. « Aujourd’hui, le transfert prend trois semaines, contre trois jours avant la révolution à cause de ces restrictions », explique Mohamad Soliman. Le directeur du département des crédits documentaires au sein d’une banque commerciale, qui a préféré l’anonymat, trouve cela normal. « Les banques doivent prendre les mesures nécessaires pour limiter le transfert des capitaux par les hommes de l’ancien régime. Mais elles répondent immédiatement aux demandes des importateurs tant qu’il y a les documents d’importation », souligne-t-il. Il considère ce début de marché noir comme un cas exceptionnel qu’il ne faut pas généraliser. « Après la révolution, les clients des banques se sont inquiétés d’une hausse des cours du dollar. Mais un retour du marché noir du dollar est impossible à cause de la politique rigoureuse de la Banque Centrale », souligne-t-il.

Les réserves pour soutenir la monnaie
En 2003, la Banque Centrale d’Egypte (BCE) a mis en place une politique visant à lier les bureaux de change aux banques en leur laissant une marge de fluctuation de 3 %. Pendant ces 7 années, la BCE a réussi à garder les taux de change du dollar stables autour de 5,50 L.E. Et en même temps, elle a réussi à cumuler des réserves en devises qui ont atteint leur niveau le plus haut en décembre dernier (soit 36 milliards de dollars). Depuis la révolution, la BCE a utilisé ces réserves pour défendre la monnaie nationale qui a perdu plus de 1,3 % de sa valeur face au billet vert. « Durant les trois derniers mois, les réserves en devises ont chuté de 5,9 milliards de dollars. C’est la plus grande baisse enregistrée en 10 ans », selon une note de la BCE qui souligne que le montant actuel des réserves est de 30,1 milliards de dollars. « La baisse des réserves va continuer au cours de la prochaine période », assure le vice-gouverneur de la BCE, Hicham Ramez, à l’Agence du Moyen-Orient (Mena, agence de presse) sans préciser le montant de la baisse. « Mais la BCE ne pourra pas continuer à utiliser l’arme des réserves pour défendre la monnaie nationale. Ce qui signifie qu’il y aura plus de pressions sur la monnaie nationale à l’avenir », explique un banquier qui a requis l’anonymat.
De plus, Hicham Ramez, vice-gouverneur de la BCE, a également déclaré que 7,5 milliards de dollars d’investissements étrangers ont disparu du marché des obligations et des bons de Trésor.
Mais Mohamad Hassan Al-Abiad, président du département des bureaux de change au sein de l’Union des chambres commerciales, assure l’importance de l’intervention de la BCE sur le marché. « Cette dernière possède 45 milliards de dollars, dont 33 milliards de réserves et 12 milliards de dépôts bancaires en dollar. Donc, il n’y a rien qui suscite l’inquiétude », souligne-t-il en prévoyant la baisse du dollar à son niveau ordinaire d’avant la révolution. « Et ce car la majorité des investisseurs ont recouru au dollar pendant la période de la fermeture de la Bourse égyptienne. Ils vont vendre leurs dollars avec la hausse des cours. Ce qui va entraîner l’augmentation de l’offre sur le marché », conclut-il.
Gilane Magdi, Al-Ahram Hebdo
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